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Brasília, DF, Brazil
Cláudia Falluh Balduino Ferreira é doutora em teoria literária e professora de literatura francesa e magrebina de expressão francesa na Universidade de Brasília. Sua pesquisa sobre a literatura árabe comunga com as fontes do sagrado, da arte, da história e da fenomenologia em busca do sentido e do conhecimento do humano.

quinta-feira, 21 de fevereiro de 2013

Entrevistando Matthieu Baumier e os mundos poéticos de Recours au Poème.

Entrevistando Matthieu Baumier, o mago de Recours au Poème: Poèmes et mondes poétiques.

Matthieu Baumier
 Em tempos incrivelmente 'despoetizados' como são os atuais, em que um certo mundo editorial corporativo, tecnológico/tecnocrata insiste em sufocar poetas e a poesia com grandes chumaços de paina (que não são do jaguaretê de Carlos Drummond de Andrade...) é com euforia mesclada de alívio (combinação própria dos sedentos pelo novo) que  vemos surgir uma revista poética aberta a todos os poetas do mundo. Falo de uma das maiores, senão a maior revista eletrônica francesa de poesia Recours au poème: poésies et mondes poétiques, ( http://www.recoursaupoeme.fr/) criada e editada por dois poetas franceses : Matthieu Baumier e Gwen Garnier Duguy, respectivamente em Lyon e Brest. Abertos ao desafio de tornar internacionalmente conhecida a revista, eles se lançaram na publicação de poetas de diversas partes do mundo! E a revista é um sucesso total, ponto de encontro de vozes plurais. Sofisticada, cosmopolita, inovadora Recours au poème publica além de poesia, ensaios, entrevistas e crônicas.  Com a iniciativa destes dois poetas franceses surgem poemas qual epifanias longamente reclusas, doravante expressas pela magia da Web: "Il n'est aucun humain en dehors du Poème et c'est à ce dernier qu'il convient d'avoir recours si nous souhaitons être frêres"... diz Baumier. O poema é aquele  para o qual pendem todos os que buscam a fraternidade dos pares. Humanismo raro, inspirador, desafiador e autêntico que combina com  as fontes do incomum, do sagrado e do sublime hoje tão massacradas pelas porosidades ásperas e  nervosas do real e do homem que ignora o panenteísmo. Nele, inclusive, está até o poema.
Matthieu Baumier gentilmente concedeu excelente entrevista ao Grupo de Estudos Literários Magrebinos Francófonos da Universidade de Brasília que quer também fazer parte desta aventura, orbitando com suas luas de poetas magrebinos de forma a compor o universo inédito de revistas-supernovas em expansão! Paralelamente à entrevista seguem os  poemas de Matthieu Baumier, em seu novo livro Le silence des pierres, (Editions Le Nouvel Athanor).
É com prazer que convidamos a todos a mergulharem na entrevista com Matthieu Baumier, para que, inspirados, saiamos em busca de mais poesia e sua divulgação generosa e ad infinitum, como é o destino das plêiades e dos que amam a poesia e a compõem nos planos intemporais dos silêncios inconsúteis.
Com a palavra pois, o mago.  
Boa leitura a todos!

Cláudia Falluh: Matthieu Baumier vous êtes poète et éditeur. On vous invite à parler un peu sur la création de  la revue Recours au poème au public brésilien. Comment est née cette idée, et comment est-elle reçue en France et ailleurs.

Matthieu Baumier: Recours au Poème est né au mois de mai 2012, en France. C’est une idée de mon ami, le poète et directeur du magazine Gwen Garnier-Duguy. Nous nous connaissons depuis longtemps, avons déjà mené des projets en commun et avons beaucoup de choses, de visions, de volontés en commun. Le magazine est né d’une insatisfaction : nous ne nous reconnaissions pas dans la situation poétique française. Pour plusieurs raisons. Il nous semblait que le monde des revues fonctionnait en petits groupes, sur la base de relations… Nous ne voulions pas de cela. Nous voulions un magazine ouvert. Nous voulions aussi un lieu de création indépendant des éditeurs et de l’Etat (subvention). C’est le cas. Recours au Poème ne doit économiquement rien à personne. D’ailleurs, nous ne vivons pas de l’édition : Gwen Garnier-Duguy et moi avons des « petits boulots » qui nous permettent de vivre, et nous faisons ce magazine en plus. Nous voulions aussi un espace dynamique et régulier : c’est pourquoi Recours au Poème est un magazine hebdomadaire. Nous le voulions international, c’est le cas. Car le milieu de la poésie française nous semblait un peu fermé sur lui-même. Bien sûr, il y a des traductions de poètes étrangers… Mais cela ne suffit pas, nous voulions et voulons un lieu vivant dans le présent, en phase avec la création poétique qui se fait maintenant. Nous sommes cependant un magazine fondé en France et nous publions beaucoup de poètes français.
La réception est excellente. Jamais aucun magazine ou aucune revue de poésie n’a été si lue en France. Ici, une revue trimestrielle peut compter sur 300/400 lecteurs réguliers… Nous atteignons en moyenne près de 10 000 lecteurs, je parle de vrais lecteurs, pas de « clics » sur internet, par mois. Nous sommes vite devenus un des lieux poétiques majeurs en France, et sans doute en Europe.
Mais, concernant la  raison d’être, disons intellectuelle, de Recours au Poème, le mieux est que je vous confie la note d’intention que nous avons diffusé à l’origine :
Recours au Poème est un magazine international de poésie publié on line. Nous considérons que le retrait de la poésie est une apparence. En réalité jamais le Poème n’a eu de rôle aussi important dans le monde qu’en cette époque troublée.
Nous voulons rassembler avec l’aide des technologies de la modernité ce qui est poétiquement épars, en différentes langues, dans un magazine diffusé à l’échelle mondiale, publiant des poètes venus de tous les horizons, de toutes générations, de toutes notoriétés, en un geste décisif : le geste poétique. Il s’agira de mettre sur le devant de la scène ce qui en forme la pierre d’angle :

Le Poème

Il n’est aucun humain en dehors du Poème et c’est à ce dernier qu’il convient d’avoir recours si nous souhaitons 
être
 frères”

C’est cela, Recours au Poème et franchement je pense que c’est pour cela que le magazine est un franc succès.

Cláudia Falluh : La revue Recours au poème et toute l’énergie créative qu’elle porte en elle est en contrepoint avec votre poème  « Ils n’existent pas, les poètes... ».  Je vois la revue et le poème comme deux systèmes en abyme, pourriez vous developper cette reflexion ?

Matthieu Baumier: Techniquement, le magazine publie des poèmes, des essais, des entretiens, des chroniques régulières de poètes, des lectures de recueils… Cela demande en effet pas mal d’énergie. Nous avons peu à peu fédéré un ensemble d’amis qui travaillent avec nous. Mais concrètement, la revue est construite par Gwen Garnier-Duguy et moi. Nous sommes des passionnés de poésie, un peu fous de mener une aventure pareille mais c’est tellement vivant ! En particulier en ce qui concerne l’entrée en relations amicales avec des poètes du monde entier. Mais je vais en venir précisément au sens de votre question.
En effet, Recours au Poème est à la fois cela, un lieu géographique et technique qui publie et défend des poésies s’écrivant aujourd’hui, mais aussi autre chose : nous ouvrons nos pages à toutes les formes de poésie que nous ressentons subjectivement comme étant authentiques, et nous tenons absolument à cela. Nous ne croyons pas aux vérités instituées. Mais, au centre de ce travail d’ouverture, nous défendons ce que nous pensons, nos convictions en matière de poésie. C’est ce que l’on peut ressentir en lisant les écrits de Paul Vermeulen ou Christophe Morlay. Ainsi que l’œuvre de certains poètes que nous défendons en particulier. Je ne vais évidemment pas tous les citer mais on comprendra mieux si je dis ceci : nous défendons une vision de la poésie que Paul Vermeulen qualifie de « poésie des profondeurs ». Pour nous, la poésie est plus qu’un simple acte littéraire. Nous pensons même qu’elle n’appartient pas au champ de la littérature. Elle est un acte sacré, reliant le présent de nos vies à celui de toutes les vies passées. En même temps, la poésie et les poètes sont, de notre point de vue, reliés au Poème en tant que lieu même du sacré. Attention, je ne parle pas ici de religion, sinon au sens originel de ce mot (religare). Je parle du sacré comme étant ce qui relie l’ensemble des parties dispersées de ce qui est la vie. En ce sens, le sacré est ce qui est plus important que vous ou moi : l’ensemble dans lequel nous sommes inscrits. Le Poème est ce en quoi nous vivons, et en même temps ce qui vit en nous. Cela respire. Et l’expression poétique profonde est, à nos yeux, celle qui plonge loin en dedans du poète et simultanément loin en dedans de ce Tout qui est la vie. Nous ne sommes évidemment pas les seuls ni les premiers à concevoir la poésie ainsi : on pensera à des poètes, par exemple, comme Juarroz, Valente, Daumal, Paz… Vous voyez, un seul français parmi ceux qui me viennent spontanément à l’esprit. Cela dit assez pourquoi Recours au Poème ne peut être qu’international. En tout cas, voilà ce que nous nommons « poésie des profondeurs », l’axe que nous défendons au sein du magazine tout en demeurant ouverts à des poésies extérieures à cette vision. Car nous pensons que l’existant n’est que dans le miroir de l’autre.
Pour revenir à la citation que vous faites de l’un de mes poèmes, oui, vous avez raison. Nous sommes clairement et ouvertement, sans fausse modestie, animés de l’état de l’esprit poétique, et nous agissons en tant qu’éditeur parce que nous sommes des poètes. Ainsi, l’action qui produit le magazine est pour nous un acte poétique. Recours au Poème est un acte poétique en dedans du Poème. Nous avons un petit côté prophétique qui énerve parfois en France mais que nous assumons pleinement : nous savons que le Poème est la chance du monde, encore plus dans ce monde-ci. La poésie et les poètes sont l’avenir de l’Homme. On le percevra mieux dans les temps de la grande catastrophe à venir, celle que le monde prosaïque dans lequel nous sommes plongés, où la Technique est devenue une sorte de divinité uniformisatrice, est en train de produire, avec le soutien de très nombreux collaborateurs humains.
Cependant, le poème que vous citez n’est pas à l’origine du magazine. Par contre, ce sont bien deux poèmes qui ont donné naissance à Recours au Poème. L’un de Gwen Garnier-Duguy, l’autre de moi. En les lisant, vous comprendrez pourquoi :
C’est l’acte de naissance de Recours au Poème. Le premier « texte » publié.
Ce qui est absolument extraordinaire et plein d’Espérance, c’est que nous sentons combien cette aventure était attendue et nécessaire. Il y a un besoin immense de ce sacré qui est constitutif du Poème dans lequel nos vies sont inscrites. Nous étions dans un temps d’oubli de l’être. Ce temps, pour nous, est révolu. Et c’est ce qui tend à apparaître. Nous sommes heureux de pouvoir apporter notre pierre à cet édifice en reconstruction. L’heure est au grand dévoilement du réel.


O poeta Gwen Garnier-Duguy

Cláudia Falluh: Actuellement, surtout dans un pays comme le Brésil, les revues et les éditions de poésies sont rares et extremement fermées, ce qui fait que les poètes qui débutent dans le terroir des « muses » ne trouvent pas d’espace car les îcones poétiques dévorent et se répètent sans cesse dans le manque d’originalité et le peu d’audace des éditeurs de nos jours.  Comment voyez-vous  cette situation ?

Matthieu Baumier: La situation que vous évoquez est la même en France et d’après les échos que nous avons, dans bien d’autres pays. La fin du 20e siècle a vu la mise en place d’une forme d’oligarchie, partout. Souvent au nom de jolies valeurs… Ces oligarchies uniformisent nos modes et nos conceptions de la vie. Cela se ressent et s’est imposé aussi dans tous les espaces artistiques. Plus encore, peut être, dans les espaces artistiques qu’ailleurs puisque l’art est par essence l’ennemi de ces oligarchies uniformisatrices. De quoi s’agit-il ? D’une lutte qui, pour n’être pas nouvelle, est cependant aujourd’hui exacerbée entre l’Etre et l’avoir. Nous sommes du côté de l’Etre. Comme la poésie. L’art en général. Jamais l’art n’a autant été un acte de résistance. Pas parce qu’i l s’avancerait en s’affirmant résistant ou politique, ou engagé… Simplement, pour ce qu’il est par nature : l’ennemi essentiel du monde dans lequel on veut nous faire vivre, ce monde que le philosophe Guy Debord qualifiait de Spectacle. Un monde ou l’image du réel devient progressivement le réel. Mais tout cela n’est… qu’une image fausse justement. Il suffit de soulever le voile un instant pour s’en apercevoir. Ce monde construit par des malades mentaux, fondé sur l’exploitation des âmes par l’avoir et le désir, ce monde n’existe pas en réalité. Il prétend à l’existence, bien sûr. Du coup, pour exercer un pouvoir sur nos Etres, il faut à ce monde une propagande quotidienne et une forme d’uniformisation totalitaire… Cependant, derrière les apparences, ce monde faux a déjà perdu. L’Etre ne perd jamais la partie. 


Seguem os poemas de  Matthieu Baumier, extraídos do livro Le silence des pierres, éditions Le Nouvel Athanor, 2013. 





L’océan n’est pas rentré au port                                                                 
Et les églantiers sont en retard
C’est la crue des cadavres.

Il y a bien une lucarne, là-haut
Mais l’échelle s’est absentée
Et des herbes muettes
Envahissent le chemin.

Il y a bien des hirondelles, là-haut
Et le tracé invisible d’un signe
Dessiné à tire d’ailes
Mais la coulée des orages vacille

Eh bien !
Il en faut du courage, au Dit du Poème
Pour s’emparer encore d’un morceau de monde.


******

Quand les tailleurs ensemençaient
Le bris du visible
Frappaient et coupaient la pierre
Accueillaient la confidence des édifices

Ils parlaient
À l’illusion bleutée
De la Terre répudiée

Que sont devenus
Les compagnons de l’Aurore ?

Il faudra bien que tout se taise
Pour qu’un son de pierre
Encore retentisse

De nos rêves exilés
Dans la mémoire des abeilles


******

La pierre de Lune
Jaillit d’une source noire
Pour écrire la terre
Dans le ciel du Poème

Elle franchit le bruit des dunes
Éloigne la cambrure des rochers
Et la pâleur des sanctuaires

Vient toujours le moment
Où l’ombre se déplace
Et envahit le silence du soir

Il pleut alors des rescapés
C’est la fin de l’instant
Le présent à marée haute


Por Cláudia Falluh.